L'OCHRES exerce une mission d'observation des problèmes économiques et sociaux, particulièrement de ceux qui relèvent des interactions entre l'entreprise et la société.
Q ue se passe-t-il au Proche-Orient ? au Soudan ? dans les prisons d’Amérique latine ? … Dans la cadre de combats sans doute légitimes, on tue ; on tue avec aisance ; ou, plus prosaïquement, on casse des oeufs tout simplement pour servir des causes possiblement justes. Dans les réseaux sociaux, beaucoup se sont extasiés devant l’efficacité d’une technologie plus ou moins chirurgicale, qui devrait pour-tant nous inquiéter, mise en oeuvre par « l’armée la plus éthique du monde » en septembre dernier (des dizaines de morts et des milliers de blessés)…
Nous apprenons qu’il y a eu en France 243 600 avortements en 2023, un chiffre en hausse continue depuis plus de trente ans. Un jour plus tard, nous apprenons que le nombre de naissances est en baisse continue. Il y a en France des territoires avec un indice conjoncturel de fécondité au-dessous de 1,40. Et nous constatons qu’il en va de même dans la plupart des pays qui nous entourent. Peu d’entre nous désirent des enfants. Encore moins souhaitent des frères et soeurs pour leur enfant. Donner la vie est parfois considéré comme une faute.
Nous sommes le 25 septembre 2024. Une proposition de loi est déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale pour favoriser l’euthanasie et le suicide assisté. Elle reçoit un appui fort de la Présidente, et même semble-t-il du Président de la République, qui aurait refusé une nomination au Conseil des ministres pour que cette proposition aboutisse. Nous sommes de moins en moins nombreux à supporter des vies – les nôtres et celles des autres - qui nous pèsent un peu et qui réclament de la solidarité.
Notre époque évolue à grande vitesse dans son rapport à la vie et la mort. Elle cherche à en éteindre les questions existentielles notamment sur la décision de donner la mort. Ce faisant, elle tue aussi la question de la vie. « La vie n’est pas aimée » disait déjà Gabriel Marcel. Dans certains cas, elle est même combattue comme un mal. Autrefois, la vie et la mort formaient une question fondatrice de la philosophie ; aujourd'hui cette question pourrait devenir un sujet anodin : un bouton que l'on pousse, une solution chimique que l'on administre, une page que l'on tourne, une déci-sion individuelle qui n'engage pas au-delà de soi, ... Sans doute les priorités dans l’existence ou le sens de la souffrance continuent d’être évoqués, mais pour quel repérage collectif quand importe surtout la question du niveau de vie ?
C’est pourquoi il nous semble que la vie et la mort sont progressivement exclues du champ de l’éthique par une conception individualiste, conjoncturelle et utilitaire de l’existence. Alors deux questions :
Peut-on sereinement envisager une société prospère, entreprenante, solidaire, si de plus en plus de vies ne méritent pas d’être vécues et si le don facile de la mort vient miner tout effort de recherche, de dialogue ou d’entraide ?
Et pour nous, qui pouvons considérer que l’amour n’existe que par et dans la vie, quel est notre pronostic vital de chrétiens, si nous ne prenons pas ce sujet à bras le coeur ? Sans vie, il n’y a pas d’amour ; sans amour, il n’y a pas de justice.
L’avenir est peut-être de vivre de plus en plus visiblement la charité pour redonner envie de vivre ?
Hervé L’Huillier